- croître
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• creistre 1080; lat. crescere « naître, grandir »1 ♦ Grandir progressivement jusqu'au terme du développement normal, en parlant des êtres organisés. ⇒ se développer, pousser; croissance. Les arbres croissent lentement. Le bois « qui a crû lentement est plus faible » (Buffon). Croître rapidement (cf. Pousser comme un champignon). — PROV. Mauvaise herbe croît toujours, se dit, par plaisanterie, des enfants qui grandissent beaucoup.♢ Littér. (des animaux, des personnes) ⇒ grandir. « Les bessons croissaient à plaisir sans être malades » (Sand). Allus. bibl. Croissez et multipliez. — Loc. Ne faire que croître et embellir, se dit d'une chose qui augmente en bien, et iron. en mal (⇒ empirer) . « sa sottise tous les jours ne fait que croître et embellir » (Molière). Littér. Croître en beauté, en sagesse : devenir plus beau, plus sage en grandissant.2 ♦ (Choses) Devenir plus grand, plus nombreux, plus intense. ⇒ augmenter, se développer. Croître en nombre, en volume, en étendue. ⇒ s'agrandir, s'étendre, gagner, grossir. « La rivière a crû, est crue » ( ACADÉMIE ). La production croît de 10% par an. « Son exaltation ne cessa de croître » (Mac Orlan). ⇒ s'accroître. Nos difficultés vont croissant.3 ♦ Pousser naturellement (végétaux). ⇒ venir. Les pays où croissent la vigne et l'olivier.⊗ CONTR. Baisser, décliner, décroître, diminuer. ⊗ HOM. Croîs :crois; crû :cru (croire).Synonymes :- pousser- se développerContraires :Grandir, se développer, s'intensifier, en parlant d'un sentiment, d'un étatSynonymes :- venirContraires :- dépérir- mourirAugmenter en quantité, en volume, en intensitéSynonymes :- monter- s'accroître- se développer- s'élargir- s'étendreContraires :- baisser- décliner- décroître- diminuer- faiblir- reculer- tombercroîtrev. intr.d1./d Se développer, grandir. Les petits de l'animal croissent, au début de leur vie, plus rapidement que ceux de l'homme.d2./d Augmenter en volume, en intensité, en nombre. La rivière a crû. L'abstentionnisme croît à chaque scrutin.d3./d (Plantes) Se développer, pousser naturellement.⇒CROÎTRE, verbe intrans.Grandir en développant de façon progressive des qualités intrinsèques par rapport à une échelle de valeur (explicitement exprimée ou non).A.— [Le suj. désigne un être, un ensemble d'êtres ou un procès doué d'une certaine autonomie; l'action est envisagée du point de vue du suj.]1. Augmenter, devenir plus grand (en nombre, étendue, durée, intensité, qualité, etc.). L'aube croître, et le jour tomber (LECONTE DE LISLE, Poèmes trag., 1886, p. 218) :• 1. G. Cassel a présenté le modèle d'une économie en croissance régulière et sans changements dans les proportions entre les flux. La population croît : la production globale croît dans la même proportion que la population :PERROUX, L'Écon. du XXe s., 1964, p. 142.2. En partic.a) [Le suj. désigne une pers.] Grandir, passer par toutes les phases du processus vital. Que nous croissons vite (E. DE GUÉRIN, Lettres, 1834, p. 57). Se reproduire, ce n'est qu'une autre manière de croître (ALAIN, Propos, 1922, p. 445) :• 2. Que de gens boivent, mangent et se marient; achètent, vendent et bâtissent; ont des amis et des ennemis, des plaisirs et des peines; naissent, croissent, vivent et meurent, mais endormis! (...). Il faut, tandis qu'on croît, vivre soumis à la volonté de ses parents. Il faut, plus tard, fonder, gouverner.JOUBERT, Pensées, t. 1, 1824, p. 226.♦ Expr. littér. Ne faire que croître et embellir. On dit (...) d'une jeune personne qui devient tous les jours plus belle, qu'elle ne fait que croître et embellir (J.-F. ROLLAND, Dict. du mauvais langage, 1813, p. 46). P. ext. [À propos d'une qualité hum.] Votre santé n'aura fait que croître et s'embellir (BALZAC, Corresp., 1828, p. 348).♦ RELIG. [P. allus. à la Genèse I, 22, etc.] Croissez et multipliez. Le peuple croît (...) à vue d'œil, comme le fils de Gargantua, et paye (...). Le peuple croît et multiplie; se peut-il autrement? (COURIER, Pamphlets pol., Lettres au rédacteur du « Censeur », 1819-20, p. 23).b) [Le suj. désigne un végétal] Pousser. Jusqu'aux bords de la tombe il croît encor des roses (LAMART., Harm., Âme triste, 1830, p. 482).♦ P. métaph. Voilà pourtant comment naissent et croissent les anecdotes, les biographies de salon; et puis le diable ne les déracinerait plus (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t. 2, 1823, p. 641).— Expr. syntagm. Croître en + subst.
) [Le subst. exprime une qualité intrinsèque du suj.] L'homme, comme l'enfant, doit croître en liberté, à mesure qu'il croît en intelligence (LAMENNAIS, L'Avenir, 1831, p. 209).
) [Le subst. exprime le résultat d'une transformation] Les pelouses avaient crû en prairies; les bassins s'étaient élargis en étangs (
, Aphrodite, 1896, p. 69). Verbe + croître. Aller croissant. Le commencement des difficultés qui nous attendent, et qui vont toujours croissant à mesure que l'édifice de nos connaissances s'élève et s'agrandit (DESTUTT DE TR., Idéol. 3, 1805, p. 309). Faire croître. Le temps vous fera croître et le temps vous tuera : Et, comme toute chose humaine et périssable, Votre œuvre ira dormir dans l'ombre irrévocable! (LECONTE DE LISLE, Poèmes ant., 1874, p. 285). Laisser croître. Pour laisser croître mes moustaches et ma barbe (REYBAUD, J. Paturot, 1842, p. 10).
— Loc. Croître comme un champignon. Croître rapidement. Mauvaise herbe croît toujours. On dit prov. et par plaisanterie des enfans qui croissent beaucoup, mauvaise herbe croît toujours (J.-P. ROLLAND, Dict. du mauvais lang., 1813, p. 46).B.— [L'action est envisagée du point de vue d'un agent, le plus souvent avec une notion de volume ou d'intensité]1. Être, devenir plus grand sous l'effet de facteurs extérieurs (directement désignés ou non). Ce bruit décevant, qui croît, (...) puis continue, décroît et s'éloigne (MAUROIS, Climats, 1928, p. 253). L'huile monte par capillarité le long de rotins ou de mèches et son débit, nul au repos, croît avec la vitesse (CHARTROU, Pétroles nat. et artif., 1931, p. 136) :• 3. ... L'eau vive en murmurant filtre par mille issues, Croît, déborde, et remue en son cours diligent La mélisse odorante et les cailloux d'argent.LECONTE DE LISLE, Poèmes ant., 1874 p. 221.♦ Emploi factitif, vx et rare. (Quasi-)synon. accroître. Je croîtrai mon bonheur dans les cieux de celui que j'aurai pu procurer aux infortunés sur la terre (BERN. DE ST-P., Harm. nat., 1814, p. 369).2. Exister, être produit. Ses vaisseaux alloient lui chercher le produit crû des terres plus fécondes (CHATEAUBR., Essai Révol., t. 1, 1797, p. 312). L'homme n'apporte rien en épousant. Rien, sinon sa force, ses bras et son cœur. Il est celui par qui le pain croît (PESQUIDOUX, Chez nous, 1921, p. 65).Prononc. et Orth. :[] ou [
], (je) croîs [
] ou [
]; crû [
]. La tendance mod. est de prononcer [a] ant. C'est la transcr. de DUB., Pt ROB., Pt Lar. 1968 (mais cf. déjà NOD. 1844). De nombreux dict. plus anc. notent [
] post. cf. FÉR. 1768, FÉR. Crit. t. 1 1787, GATTEL 1841, FÉL. 1851, LITTRÉ (mais cf. encore PASSY 1914, BARBEAU-RODHE 1930, Lar. Lang. fr. et comme 1re var. à côté de [a] ant. WARN. 1968). D'apr. ROUSS.-LACL. 1927, p. 138 ce ne sont plus que les personnes âgées de Paris et les provinciaux qui persistent à prononcer [
] post. Le timbre post. s'explique comme pour le verbe croire par l'infl. de r vélaire du groupe cr. L'accent circonflexe qui trahit la disparition de l's de l'anc. forme croistre peut contribuer à maintenir le timbre post. Comme pour croire le lang. cour. à partir du XIVe s., a réduit la diphtongue -oi- à [
] ouvert : crestre, souvent écrit crètre ou craître. Cette dernière forme est encore mentionnée ds FÉR. 1768, FÉR. Crit. t. 1 1787 et GATTEL 1841 alors que BOURC.-BOURC. 1967, p. 54 souligne qu'il y a hésitation entre [
] et [wa] jusqu'au XVIIe s. Conjug. L'accent circonflexe évite la confusion dans la graph., entre certaines formes du verbe croire et certaines formes du verbe croître. Ainsi je crois (croire) et je croîs (croître). Cet accent est présent dans presque toute la conjug. de croître même au subj. imp. : que je crûsse et au part. masc. sing. crû. Il est absent des formes croissons, croissez, croissent et du part. passé au fém. et au plur. crue, crus, crues. Comparer avec accroître et décroître qui ne prennent pas d'accent aux formes suiv. : j'accrois, je décrois, tu accrois, tu décrois, j'accrus, je décrus, il accrut, il décrut, ils accrurent, ils décrurent, accru, décru (masc. sing. comme au fém. et au plur.). Enq. : (il) croît/
, (D)/; (ils) croissent/
, (D)/. Le verbe est attesté ds Ac. 1694 et 1718 s.v. croistre; ds Ac. 1740-1932 sous la forme moderne. L'Ac. ne met pas d'accent circonflexe au subj. imp. : que je crusse (cf. aussi Lar. 19e-Lar. encyclop.). Homon. : formes du verbe croire; cru (non cuit) et part. passé crû; croix et formes du verbe croître : croîs, croît. Étymol. et Hist. Ca 1100 « pousser, prospérer (de plantes) » (Roland, éd. J. Bédier, 980). Du lat. class. crescere « naître, d'où pousser en parlant des plantes » et « grandir, augmenter (au propre et au fig.) ». Fréq. abs. littér. : 1 881. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 4 270, b) 2 453; XXe s. : a) 2 049, b) 1 808. Bbg. ARICKX (I.). Les Orthoépistes sur la sellette. Trav. Ling. Gand. 1972, n° 3, p. 124. — COHEN 1946, p. 34. — GOTTSCH. Redens. 1930, p. 25, 26, 64, 194.
croître [kʀwɑtʀ] v. intr.CONJUG. je croîs, tu croîs, il croît, nous croissons, vous croissez, ils croissent; je croissais, nous croissions; je crûs, nous crûmes (inus.); je croîtrai, nous croîtrons; je croîtrais, nous croîtrions; que je croisse, que nous croissions; que je crûsse, que nous crûssions (inus.); croîs, croissant; crû.ÉTYM. 1080, creistre, Chanson de Roland; croistre, XIIe; crestre, crètre, craître jusqu'au XVIIIe; du lat. crescere « naître, grandir ».❖1 Vieilli ou littér. (⇒ Grandir, pousser, cour.). Grandir progressivement jusqu'au terme du développement normal, en parlant des êtres organisés. ⇒ Développer (se), gagner; croissance, crue. || Croître insensiblement. || Croître très vite, à vue d'œil, comme un champignon. || Se remettre à croître. ⇒ Renaître, repousser. || Les végétaux croissent à une certaine hauteur. ⇒ Tasser, végéter. — Au p. p. || « Les arbres crûs depuis mon départ » (Littré).1 Ainsi l'on vit l'aimable SamuelCroître à l'ombre du tabernacle.Racine, Athalie, II, 9.2 Le bois qui, dans le même terrain, croît le plus vite est le plus fort; celui qui a crû lentement est plus faible que l'autre.Buffon, Expérience sur les végétaux, 1er mém.♦ Faire croître. || Le beau temps a fait croître les légumes. — Laisser croître. || Laisser croître la récolte.♦ Littér. (Des animaux, des personnes). Grandir. || Les animaux, les enfants croissent jusqu'à un certain âge. ⇒ Croissance (cour.). → aussi ci-dessous, 3.3 Les bessons croissaient à plaisir sans être malades plus que d'autres enfants, et mêmement ils avaient le tempérament si doux et si bien façonné qu'on eût dit qu'ils ne souffraient point de leurs dents ni de leur croît, autant que le reste du petit monde.G. Sand, la Petite Fadette, II, p. 13.♦ Pousser naturellement (végétaux). ⇒ Naître, pousser, venir. || Les pays où croissent la vigne et l'olivier. || Ce sol fait croître des arbres magnifiques, de belles récoltes. ⇒ Nourrir, prospérer. || Ici, le blé ne croît pas. || Bois qui croît dans les terres labourables. ⇒ Écrues.♦ Figuré :4 Je ne fais pas un livre, il se fait. Il mûrit et croît dans ma tête comme un fruit.A. de Vigny, Journal d'un poète, p. 109.♦ Littér. || Laisser croître sa barbe, ses cheveux (→ Accompagner, cit. 10).♦ ☑ Loc. Mauvaise herbe croît toujours, se dit, par plaisanterie, des enfants qui grandissent beaucoup. — ☑ Loc. cour. Ne faire que croître et embellir, se dit d'une jeune personne qui devient de plus en plus belle en grandissant, ou, d'une chose qui augmente en bien, et, iron., en mal (⇒ Empirer).5 (…) sa sottise tous les jours ne fait que croître et embellir.Molière, la Comtesse d'Escarbagnas, 1.6 (…) le détraquement de Letondu ne fit que croître et embellir.Courteline, Messieurs les ronds-de-cuir, 5e tableau, I, p. 161.♦ Par ext. || Croître en (suivi d'un subst. sans article). || Croître en liberté. || Croître en harmonie. — ☑ Loc. Spécialt. Croître en beauté, en sagesse, en vertu… : acquérir progressivement plus de beauté, de sagesse, de vertu.7 Et Jésus croissait en sagesse, en âge et en grâce, devant Dieu et devant les hommes.Bible (Sacy), Évangile selon saint Luc, II, 52.2 (Choses). Devenir plus grand, plus nombreux, plus intense. ⇒ Accroître, augmenter, développer. || Croître en volume, en étendue. ⇒ Agrandir (s'), étendre (s'), enfler, grossir… || Croître en intensité. ⇒ Redoubler. || Croître en durée. || La fonte des neiges fait croître la rivière. || « La rivière a crû, est crue » (Académie). ⇒ Crue, n. f. || Le vent croît. || La lune commence à croître (⇒ Croissant). || Le jour, la nuit croît rapidement. || Les marées croissent dans l'équinoxe. || Jours qui croissent au printemps. ⇒ Allonger. || Le bruit croît (→ Arrêt, cit. 5). || Le tumulte croît à mesure que l'on se rapproche. || La fièvre croît. || Sentiment, passion qui croît.8 Ah ! laisse à ma fureur le temps de croître encore (…)Racine, Andromaque, II, 1.9 L'amour qui croît peu à peu par degrés ressemble trop à l'amitié pour être une passion violente.La Bruyère, les Caractères, IV, 13.10 (…) mon désir croît avec ma honte, et je rentre enfin comme un sot, dévoré de convoitise, ayant dans ma poche de quoi la satisfaire, et n'ayant osé rien acheter.Rousseau, les Confessions, I.11 L'amour peut toujours croître ou diminuer.Stendhal, De l'amour, p. 315.12 Par la jalousie véritable l'affection d'amour croît toujours.Stendhal, De l'amour, p. 317.13 Il peut arriver que la fureur des sens croisse avec la passion.André Suarès, Trois hommes, « Dostoïevski », IV, p. 238.14 Son exaltation ne cessa de croître jusqu'au crépuscule de la nuit.P. Mac Orlan, la Bandera, XV, p. 180.3 ☑ Allus. bibl. Croissez et multipliez-vous : augmentez en nombre. ⇒ Multiplier.15 Dieu les bénit (l'homme et la femme), et leur dit : Croissez et multipliez-vous (…)Bible (Sacy), Genèse, I, 28.16 (…) le nombre des Barbares qui se pressaient aux portes semblait croître.J. Bainville, Hist. de France, p. 17 (→ Anarchie, cit. 6).17 Son curé lui a dit : « Croissez et multipliez », de sorte qu'il ne prend plus de précautions. « Heureusement », dit sa femme, « j'ai fait une fausse couche, et j'ai tout arrêté. Mais si je l'avais laissé faire, il aurait rempli d'enfants la maison ».J. Renard, Journal, 1er nov. 1902.4 V. tr. Vx. Accroître. || Croître les difficultés de qqn. || Croître son bonheur, son malheur. || Cet encouragement va croître son zèle.❖CONTR. Atrophier, baisser, décliner, décroître, diminuer, rabougrir, tomber.DÉR. et COMP. Croissance, 1. et 2. croissant, croît, crue, décroître, recroître. — V. Accroître, excroissance, surcroît.HOM. Formes du v. croire. — (Du p. prés.) 1. et 2. Croissant.
Encyclopédie Universelle. 2012.